Ce matin (Dimanche) votre chroniqueur a eu l’honneur et l’avantage de vérifier par lui-même de visu la supériorité incontestable de notre « civilisation » sur tout ce qui vécut avant nous, tout ce qui existe encore aujourd’hui en dépit de nous et tout ce qui survivra après nous ; en admettant qu'il subsiste quoi que ce soit après notre disparition, ce qui est loin d’être gagné.
Bref votre correspondant s’est heurté tout à fait involontairement, croyez-le bien chers lecteurs, aux spécimens les plus représentatifs de notre monde de Cochon sur Terre, nous voulons dire ceux qui représentent l’achèvement ultime de notre espèce immaculée : le touriste.
Il y en avait beaucoup ; imaginez-vous deux cars pleins, par conséquent au moins une centaine. Donc une masse de touristes puisque ces êtres-là ne se déplacent qu’en troupeaux. Ils sont d’ailleurs sociologiquement programmés pour cela. Ils étaient répartis en plusieurs groupes, au moins six apparemment puisque votre chroniqueur a repéré un panneau portant le numéro six, tenu à bout de bras par une « souteneuse touristique » qui rassemblait ainsi la part du troupeau qui lui était assignée ; cette dernière la suivait le plus docilement du monde, en toute confiance, sans aucune volonté de savoir où on les menait ; la destination aurait bien pu être l’abattoir qu’ils n’en auraient peut-être pas été plus placides que çà. Mais ce n’était pas leur jour. Tous affichaient ce même air béat et niais qui est leur marque de fabrique, cet air qui se transforme si vite en grimaces transpirant la cruauté la plus impitoyable au cas où ils sentiraient leur gamelle menacée.
Mais il fallut d’abord que le troupeau entreprenne de descendre des cars, ces wagons à marchandise humaine. Comme ces gens là n’ont pas l’habitude d’utiliser leurs jambes, il fallut ajouter un marchepied en bois (avec dessus en moquette verte) afin que l’écart entre la marche du car et le sol ne soit pas trop important (au moins 20 cm, de quoi se tuer !) ; et puis il fallait à tout prix éviter un effort par trop inhabituel à ces êtres si délicats, exercice qui auraient pu les traumatiser pour longtemps, nécessitant l’habituelle panoplie de souteneurs psychologiques et de séances intensives de soins affectifs, aggravant encore le déficit de la sécurité sociale ; sans parler des cascades de procès. Cela dit n’ayons garde d’occulter une autre raison à toutes ces manoeuvres : l’embonpoint chronique qui est devenu un « droit », parmi tant d’autres ; « surpoids » donc ne permettant plus l’utilisation, naguère quotidienne pour leurs ancêtres lointains, de ces membres (aucun jeux de mots svp... quoi que...) qui se sont développés au cours de millénaires d’évolution en fonction des besoins de l’espèce. C’est bien pour cette raison qu’aujourd’hui ils sont en voie d’atrophie accélérée chez ceux dont nous parlons.
Bref cette masse de bipèdes en voie de bibendumisation, rutilants, bien astiqués, dignes représentants de notre classe moyenne en voie de disparition rapide, fleurons de notre « civilisation » moribonde, bref ces prototypes créés de toute pièce par notre monde innommable s’apprêtaient à traverser une rue par un dimanche matin des plus calme.
Quelle aventure, chers lecteurs, quelle folie, quelle inconscience ! Mais rassurez-vous tout était prévu afin que cette odyssée extraordinaire leur laisse à la fois un souvenir mémorable et ne finisse pas en tragédie grecque. En effet les « souteneuses touristiques » qui les accompagnaient s’occupèrent, en vrai « pros » qu’elles étaient, de régler le trafic afin de sauver la survie de leurs protégés, permettant ainsi à ces héros de gagner le trottoir d’en face « en toute sécurité » ; ces derniers firent preuve d’une prudence de sioux, certains se tenant par la main, probablement afin de se donner du courage pour affronter cette épreuve ; avant de se jeter sur le macadam, tous jetèrent de longs regards apeurés sur l’horizon, démontrant par là à quel point leur instinct de conservation s’était bien conservé depuis l’acquisition de la position verticale par nos ancêtres... Mais aucun danger majeur n’apparut, même pas une bicyclette. Ne riez pas chers lecteurs, car cela suffirait amplement pour constituer un péril mortel ! A noter au passage la pertinence de notre sacro-saint fétiche du « principe de précaution » qui consiste à nous apprendre à être terrorisé en permanence afin de développer toujours plus notre « instinct de sécurité »... En attendant, grâce à ce dernier désormais érigé en dogme incontournable de notre meilleur des mondes innommable, aucune perte ne fût à déplorer au cours de cette traversée mémorable ; il n’y eut aucune victime. Quel exploit, cher lecteur, lorsqu’on pense à toutes les innombrables victimes potentielles (en réalité la population tout entière) dont le rêve le plus cher est qu’on leur reconnaisse ce statut envié entre tous, cet horizon indépassable pour tout citoyen de Cochon sur Terre !
Une fois sauvé sur le trottoir d’en face, ce troupeau d’âge et de revenus moyens mais à l’égotisme très, très élevé (un peu comme les radiations nucléaires de Fukushima : 100.000 fois plus hautes que la moyenne), ce bétail touristique fut donc dirigé vers le lieu pour lequel ils avaient spécialement fait 10.000 km en avion, cet endroit particulièrement typique du pays dans lequel ils se trouvaient et grâce auquel ils pourraient apprécier véritablement cette « altérité » dont nous sommes si friands à Cochon sur Terre.
Votre chroniqueur put ainsi apprécier le changement qui s’opéra sur les faces porcines de tous les membres du groupe lorsqu’ils se rendirent compte de ce qui les attendaient. Ce furent surtout les lueurs qui jaillirent de tous ces petits yeux enfoncés dans leurs orbites qui trahirent le plus l’excitation qui les assaillit à la vue de l’endroit en question. Des lueurs dans lesquelles se disputaient l’envie tout autant que l’instinct de compétition stimulé par la présence du voisin chez lequel exactement les mêmes sentiments se développaient en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire.
Aussitôt le troupeau se rua à travers les portes grandes ouvertes, pressant à qui mieux mieux, bousculant sans gène si çà n’avançait pas assez vite, saisissant au passage tout ce qui se présentait, ayant le réflexe d’attraper tout ce dont le voisin de devant se saisissait, quitte à le rejeter n’importe où par la suite si cela ne convenait pas etc... Bref ils étaient dans un de ces magasins caractéristiques de Cochon sur Terre, une sorte de supermarché du souvenirs, gorgés de pacotilles fabriqués en Chine destinées à rappeler à ces êtres sans mémoires qu’ils s’étaient déplacés dans tel pays, tel jour de telle année de leur survie misérable ; colifichets destinés à leur faire croire qu’ils avaient voyagé alors qu’ils n’avaient fait que se remuer l’arrière train, puisque le pays dans lequel ils s’étaient déplacés ressemblait désormais quasiment en tout point à celui d’où ils venaient eux-mêmes ; gadget dont la fonction serait de leur faire croire qu’ils avaient vécu où plutôt qu’ils n’avaient pas survécu en vain. Cette « expédition » dans ce bazar de pacotille resterait la meilleure « expérience » et le plus beau souvenir de leur déplacement à 10.000 km de chez eux.
A ce point-là de son observation votre chroniqueur n’eut pas le courage de rester plus longtemps à observer les comportements indécents de ses congénères en proie à ces convulsions d’achat si encouragées par notre société immaculée.
Après un solide double whisky avalé d’un trait pour se remettre de ce spectacle pathétique si représentatif de notre civilisation en voie d’extinction, votre chroniqueur passa devant un kiosque à journaux où son regard accrocha les quelques joyeux titres qui se disputaient la une et qui justifient si bien l’optimisme obligatoire de notre société de droits, paritaire, tolérante, bonne, pacifique, généreuse et surtout libre bien entendu : Libye, Fukushima, Afghanistan, déficit budgétaire, pollution, famine...
Une lumière s’alluma dans notre cervelas découragé : tous ces événements relatés dans les journaux, toutes les folies suicidaires déployées par notre triste époque n’avaient au fond pas d’autres causes que la satisfaction impérative des caprices sans cesse grandissants et toujours plus puérils des citoyens de Cochon sur Terre ; caprices érigés en droits sacrés et intangibles, indiscutables et inaliénables par des politiciens veules et corrompus ; des politiciens incompétents produits par un système en pleine déliquescence ; décadence elle-même due à une démagogie de plus en plus échevelée élevée au rang de politique pour plaire au citoyen électeur, dont ceux qui venaient de traverser la rue constituaient un bon échantillon.
Pendant ce temps-là tout le monde est content à Cochon sur Terre, le meilleur des mondes.
Bref votre correspondant s’est heurté tout à fait involontairement, croyez-le bien chers lecteurs, aux spécimens les plus représentatifs de notre monde de Cochon sur Terre, nous voulons dire ceux qui représentent l’achèvement ultime de notre espèce immaculée : le touriste.
Il y en avait beaucoup ; imaginez-vous deux cars pleins, par conséquent au moins une centaine. Donc une masse de touristes puisque ces êtres-là ne se déplacent qu’en troupeaux. Ils sont d’ailleurs sociologiquement programmés pour cela. Ils étaient répartis en plusieurs groupes, au moins six apparemment puisque votre chroniqueur a repéré un panneau portant le numéro six, tenu à bout de bras par une « souteneuse touristique » qui rassemblait ainsi la part du troupeau qui lui était assignée ; cette dernière la suivait le plus docilement du monde, en toute confiance, sans aucune volonté de savoir où on les menait ; la destination aurait bien pu être l’abattoir qu’ils n’en auraient peut-être pas été plus placides que çà. Mais ce n’était pas leur jour. Tous affichaient ce même air béat et niais qui est leur marque de fabrique, cet air qui se transforme si vite en grimaces transpirant la cruauté la plus impitoyable au cas où ils sentiraient leur gamelle menacée.
Mais il fallut d’abord que le troupeau entreprenne de descendre des cars, ces wagons à marchandise humaine. Comme ces gens là n’ont pas l’habitude d’utiliser leurs jambes, il fallut ajouter un marchepied en bois (avec dessus en moquette verte) afin que l’écart entre la marche du car et le sol ne soit pas trop important (au moins 20 cm, de quoi se tuer !) ; et puis il fallait à tout prix éviter un effort par trop inhabituel à ces êtres si délicats, exercice qui auraient pu les traumatiser pour longtemps, nécessitant l’habituelle panoplie de souteneurs psychologiques et de séances intensives de soins affectifs, aggravant encore le déficit de la sécurité sociale ; sans parler des cascades de procès. Cela dit n’ayons garde d’occulter une autre raison à toutes ces manoeuvres : l’embonpoint chronique qui est devenu un « droit », parmi tant d’autres ; « surpoids » donc ne permettant plus l’utilisation, naguère quotidienne pour leurs ancêtres lointains, de ces membres (aucun jeux de mots svp... quoi que...) qui se sont développés au cours de millénaires d’évolution en fonction des besoins de l’espèce. C’est bien pour cette raison qu’aujourd’hui ils sont en voie d’atrophie accélérée chez ceux dont nous parlons.
Bref cette masse de bipèdes en voie de bibendumisation, rutilants, bien astiqués, dignes représentants de notre classe moyenne en voie de disparition rapide, fleurons de notre « civilisation » moribonde, bref ces prototypes créés de toute pièce par notre monde innommable s’apprêtaient à traverser une rue par un dimanche matin des plus calme.
Quelle aventure, chers lecteurs, quelle folie, quelle inconscience ! Mais rassurez-vous tout était prévu afin que cette odyssée extraordinaire leur laisse à la fois un souvenir mémorable et ne finisse pas en tragédie grecque. En effet les « souteneuses touristiques » qui les accompagnaient s’occupèrent, en vrai « pros » qu’elles étaient, de régler le trafic afin de sauver la survie de leurs protégés, permettant ainsi à ces héros de gagner le trottoir d’en face « en toute sécurité » ; ces derniers firent preuve d’une prudence de sioux, certains se tenant par la main, probablement afin de se donner du courage pour affronter cette épreuve ; avant de se jeter sur le macadam, tous jetèrent de longs regards apeurés sur l’horizon, démontrant par là à quel point leur instinct de conservation s’était bien conservé depuis l’acquisition de la position verticale par nos ancêtres... Mais aucun danger majeur n’apparut, même pas une bicyclette. Ne riez pas chers lecteurs, car cela suffirait amplement pour constituer un péril mortel ! A noter au passage la pertinence de notre sacro-saint fétiche du « principe de précaution » qui consiste à nous apprendre à être terrorisé en permanence afin de développer toujours plus notre « instinct de sécurité »... En attendant, grâce à ce dernier désormais érigé en dogme incontournable de notre meilleur des mondes innommable, aucune perte ne fût à déplorer au cours de cette traversée mémorable ; il n’y eut aucune victime. Quel exploit, cher lecteur, lorsqu’on pense à toutes les innombrables victimes potentielles (en réalité la population tout entière) dont le rêve le plus cher est qu’on leur reconnaisse ce statut envié entre tous, cet horizon indépassable pour tout citoyen de Cochon sur Terre !
Une fois sauvé sur le trottoir d’en face, ce troupeau d’âge et de revenus moyens mais à l’égotisme très, très élevé (un peu comme les radiations nucléaires de Fukushima : 100.000 fois plus hautes que la moyenne), ce bétail touristique fut donc dirigé vers le lieu pour lequel ils avaient spécialement fait 10.000 km en avion, cet endroit particulièrement typique du pays dans lequel ils se trouvaient et grâce auquel ils pourraient apprécier véritablement cette « altérité » dont nous sommes si friands à Cochon sur Terre.
Votre chroniqueur put ainsi apprécier le changement qui s’opéra sur les faces porcines de tous les membres du groupe lorsqu’ils se rendirent compte de ce qui les attendaient. Ce furent surtout les lueurs qui jaillirent de tous ces petits yeux enfoncés dans leurs orbites qui trahirent le plus l’excitation qui les assaillit à la vue de l’endroit en question. Des lueurs dans lesquelles se disputaient l’envie tout autant que l’instinct de compétition stimulé par la présence du voisin chez lequel exactement les mêmes sentiments se développaient en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire.
Aussitôt le troupeau se rua à travers les portes grandes ouvertes, pressant à qui mieux mieux, bousculant sans gène si çà n’avançait pas assez vite, saisissant au passage tout ce qui se présentait, ayant le réflexe d’attraper tout ce dont le voisin de devant se saisissait, quitte à le rejeter n’importe où par la suite si cela ne convenait pas etc... Bref ils étaient dans un de ces magasins caractéristiques de Cochon sur Terre, une sorte de supermarché du souvenirs, gorgés de pacotilles fabriqués en Chine destinées à rappeler à ces êtres sans mémoires qu’ils s’étaient déplacés dans tel pays, tel jour de telle année de leur survie misérable ; colifichets destinés à leur faire croire qu’ils avaient voyagé alors qu’ils n’avaient fait que se remuer l’arrière train, puisque le pays dans lequel ils s’étaient déplacés ressemblait désormais quasiment en tout point à celui d’où ils venaient eux-mêmes ; gadget dont la fonction serait de leur faire croire qu’ils avaient vécu où plutôt qu’ils n’avaient pas survécu en vain. Cette « expédition » dans ce bazar de pacotille resterait la meilleure « expérience » et le plus beau souvenir de leur déplacement à 10.000 km de chez eux.
A ce point-là de son observation votre chroniqueur n’eut pas le courage de rester plus longtemps à observer les comportements indécents de ses congénères en proie à ces convulsions d’achat si encouragées par notre société immaculée.
Après un solide double whisky avalé d’un trait pour se remettre de ce spectacle pathétique si représentatif de notre civilisation en voie d’extinction, votre chroniqueur passa devant un kiosque à journaux où son regard accrocha les quelques joyeux titres qui se disputaient la une et qui justifient si bien l’optimisme obligatoire de notre société de droits, paritaire, tolérante, bonne, pacifique, généreuse et surtout libre bien entendu : Libye, Fukushima, Afghanistan, déficit budgétaire, pollution, famine...
Une lumière s’alluma dans notre cervelas découragé : tous ces événements relatés dans les journaux, toutes les folies suicidaires déployées par notre triste époque n’avaient au fond pas d’autres causes que la satisfaction impérative des caprices sans cesse grandissants et toujours plus puérils des citoyens de Cochon sur Terre ; caprices érigés en droits sacrés et intangibles, indiscutables et inaliénables par des politiciens veules et corrompus ; des politiciens incompétents produits par un système en pleine déliquescence ; décadence elle-même due à une démagogie de plus en plus échevelée élevée au rang de politique pour plaire au citoyen électeur, dont ceux qui venaient de traverser la rue constituaient un bon échantillon.
Pendant ce temps-là tout le monde est content à Cochon sur Terre, le meilleur des mondes.
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