mardi 8 octobre 2013

Moyen-Orient : le vent tourne où a t'il déjà tourné ?

Résumons donc les événements de ces dernières deux semaines :

  • Le projet d’attaque de la Syrie est rejetée par le Parlement britannique.
  • Le projet d’attaque de la Syrie est en passe d’être refusé par le Congrès.
  • L’opinion publique US est contre la guerre à une grande majorité.
  • La Syrie accepte de livrer ses armes chimiques sous l’égide russe.
  • Le Conseil de Sécurité entérine la proposition russe sur les armes chimiques syrienne sans clause de recours à la force.
  • Conversation téléphonique entre Obomber et Rouhani, une première depuis plus de trente ans entre les chefs d’Etat US et iranien.
  • Le roi d’Arabie-Saoudite invite le Président iranien à venir en pèlerinage à la Mecque.
  • Sergueï Lavrov, Ministre des AE de Russie déclare qu’après l’exemple syrien il faut désormais libérer tout le Moyen-Orient des armes de destruction massive, sous-entendu les armes chimiques et nucléaires israéliennes en particulier.
  • Comme en réponse, le Président israélien déclare qu’Israël ne serait pas opposé, en principe, au démantèlement de ses propres armes chimiques ais il ne parle pas des armement atomiques.
  • Obomber déclare dans un discours que la fatwa de l’Ayatollah Khamenei mettant les armes nucléaires hors la loi de l’Islam, bien que cette fatwa date de bien longtemps déjà, est un acte très important et qu’il faut prendre en compte comme allant dans le sens d’une volonté sincère de la part es iraniens d’aboutir à une résolution du problème nucléaire iranien.
  • Le vice président US Joe Biden est allé pour le première fois assister et faire un discours à la convention de J-Street, le lobby juif rival de l’AIPAC, beaucoup plus modéré sur les questions des colonies, voire opposé, et partisan de la solution de deux états distincts.
  • En Syrie, 13 milices parmi les plus importantes se regroupent sous l’égide du Front Al Nusra et déclarent ne pas reconnaitre l’autorité ni de la FSA ni du pseudo gouvernement fantoche en exil soutenu par l’Occident. A noter que des milices auparavant sous l’ombrelle de la FSA passent dans le camp des islamistes en nombre de plus en plus important.
  • « L’opposition syrienne » est de plus en plus divisée en factions rivales qui finissent par se battre entre elles.
  • Une partie de l’opposition syrienne, face à la menace grandissante des islamistes, finit par négocier avec le gouvernement syrien, tant localement que plus globalement, des accords de cesser le feu, voir de cessation des combats et de retour à la vie civile de ses membres.
  • Pendant ce temps l’armée syrienne remporte de continuelle victoires sur les terroristes.

Le vent est-il en train de tourner où a t’il déjà tourné au Moyen-Orient ?

Selon nous il a déjà tourné.

Le retrait des USA des affaires de la région est désormais un fait dont tous les acteurs régionaux ont pris conscience, y compris et surtout l’Arabie Saoudite et Israël qui se retrouvent soudain bien isolés par l’abrupte volte face des USA vis à vis la Syrie et l’Iran.
Comme nous l’avions déjà dit, la stratégie ultra confrontationniste  du clan saoudien mené par Bandar Ben Sultan envers l’Iran et les shiites en général a totalement échoué. Avec le retrait des USA, les Saoudiens doivent se rendre compte rapidement qu’ils ne pourront plus compter sur le soutien des USA pour les soutenir, ne serait-ce que parce que les USA n’en n’ont plus les moyens militaires ni financiers, et que ce n’est pas seulement Obomber mais le pays tout entier qui a changé d’attitude vis à vis de la question iranienne comme du soutien inconditionnel à Israël. 
La seule voie qui reste pour les Saoudiens est donc une négociation directe avec les Iraniens pour un modus vivendi dans toute la région. Ces derniers ont clairement montré qu’ils y étaient disposés en nommant le 10 Septembre dernier le contre amiral Ali Shamkhani chef du « Supreme National Security Council ». Shamkhani est iranien mais arabe ethniquement. Il fut, entre autres fonctions, Ministre de la défense dans le gouvernement Khatami de 1997 à 2005 et il entretint de bonnes relations avec les pays du Golfe, notamment les Saoudiens dont le Roi Fahd lui décerna la décoration de l’Ordre d’Abdul Aziz Al Saud, la plus haute décoration existante en Arabie Saoudite, ce qui montre à quel point il est l’interlocuteur idéal pour les saoudiens. Sa nomination est donc très loin d’être anodine puisqu’il sera ainsi en mesure de mener les négociations nécessaires entre les deux pays avec la discrétion indispensable.

Le dialogue entre Iraniens et Monarchies du Golfe ne sera pas très difficile à renouer pour le simple et bonne raison qu’il n’a jamais cessé. Il reprendra simplement selon d’autres considérations factuelles qui devraient rendre les Saoudiens plus accommodants étant donné la fragilité interne du régime et le manque de soutien extérieur qui est le leur désormais. De plus Iraniens et Saoudiens ont au moins un ennemi et un objectif commun : Al Qaéda et sa destruction.

En Syrie, la situation évolue à vitesse grand V. 
La dernière intervention de Kerry en compagnie de Sergueï Lavrov à Bali doit être vue à l’aune du grand changement politique en cours au Moyen-Orient :

“I think it is also credit to the Assad regime for complying rapidly as they are supposed to,” Kerry said at a joint newspress conference with Russian Foreign Minister Sergei Lavrov, whose government helped craft the Syrian chemical disarmament plan, averting threatened U.S. airstrikes against Syria. “Now, we hope that will continue. I’m not going to vouch today for what happens months down the road. But it is a good beginning and we should welcome a good beginning.”

Pour le première fois le régime Assad n’est ni criminalisé ni vilipendé, bien au contraire. Est-ce l’amorce tranquille du changement d’attitude amorcé par les USA à propos de la Syrie et du régime du Président Assad qui reste le seul et unique véritable opposant efficace aux terroristes islamistes et à Al Qaeda dans le pays ? C’est très probable. D’ailleurs on ne parle plus de changement de régime. Cela d’autant moins que les seuls qui se glisseraient dans les ruines étatiques seraient précisément les islamistes et Al Qaeda.

Le grand marchandage a commencé au Moyen-Orient pour le partage des zones d’influence qui détruira définitivement l’héritage des accords Sickes-Picot.

Le vent a tourné.

Affaire à suivre.

Mais pour le moment tout le monde est content à Cochon sur Terre, le meilleur des mondes.

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