par Jean Seymour.
L’affiche était attirante. Je me retrouve donc au musée d’art moderne de la ville de Paris ne connaissant pas les artistes, n’ayant rien lu sur l’exposition « Any Ever ». Pourquoi pas après tout, faisons confiance à la programmation de l’Institution... Il n’y a pas foule ce samedi matin ; je peux grimper les marches quatre à quatre, le cœur léger.
Et là tout se complique.
Des centaines de mètres carrés pour un « univers en expansion » dixit les commissaires, envahis par les objets de nos sociétés de consommation accrochés, attachés, imbriqués les uns aux autres ; il s’ensuit des salles obscures où sont projetés Trill-ogy Comp (2009) et les quatre films qui composent Re’Search Wait’S (2009-2010). Les commissaires indiquent que « chaque vidéo possède ainsi son lieu propre où le son a un rôle à part entière ».
Que nous disent ces artistes ? Que la technique nous transforme, que nous sommes en train de muter, que nous devenons de la matière. Les commissaires le disent autrement en nous expliquant que les deux artistes réexaminent « les codes du monde réel et les règles du langage ».
Pourquoi alors, à mesure que je découvrais ces installations et ces vidéos, naissait en moi le sentiment du vide de la proposition artistique face à la profusion des objets-sculptures et l’inanité des films ? Pourquoi ne ressentais-je pas en moi « une frénésie sombre et jubilatoire » de cette « expérimentation formelle » comme nos chers commissaires nous y invitent ?
N’est pas Duchamp ou Picasso qui veut. Le ready-made est un art qui a déjà exploré de très nombreuses formes et chemins. Je trouve que Ryan Trecartin et Lizzie Fitch, s’ils ne manquent pas d’humour, offrent dans leur jusqu’au boutiste, un geste lourd, répétitif. Je me suis terriblement ennuyé – aussi ai-je redescendu les marches intérieures du palais l’esprit contrarié.
Mon conseil : rendez-vous dans la salle de la collection permanente où sont exposées trois œuvres monumentales de Bernard Buffet, don récent de sa famille. Regardez le tableau La Mort 5. Peint en 1999, c’est probablement l’une des dernières œuvres du peintre. Un tableau prémonitoire, doté d’une très grande force. J’ai cru que cela était une œuvre de Basquiat. Buffet-Basquiat, correspondance(s) ? J’en ai été ému. (Vous pourrez admirer dans la salle d’à côté une série de 13 photos Les catacombes des capucins de Jean-Loup Sieff, série admirable d’authentiques vanités – et qui offrent un tout autre élan que la paire Trecartin & Fitch pour réfléchir à notre condition humaine).
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