Le Ministère Russe de la Défense a annoncé il y a quelques jours l'arrivée sur le théatre des opérations syriens de nouveaux avions de combat déstinés à augmenter les capacités de frappe contre Daesh.
En revanche aucun avions russes supplémentaires ne sera envoyé en Syrie.
Les nouveaux avions resteront basés en Russie, principalement dans le Caucase. Mais ce sont des modèles qui ne sont pas présents en Syrie pour l'instant, et qui ne le seront certainement jamais, à l'exception du Sukhoi SU35.
De quoi parle t'on ?
Bombardiers stratégiques lourds à très long rayon d'action :
Il s'agit d'abord du fameux bombardier statégique Tupolev TU 95 (nom de code de l'Otan "Bear") dont les deux premiers exemplaires de série ont vu le jour en Octobre 1955. Depuis, la production de cet appareil à très long rayon d'action (12.000 km 0 13.000 km) a continué jusqu'à nos jours. Tous les TU95 de la flotte russe d'aujourd'hui furent construits après 1981. Son armement consiste en seize missiles KH555 ( famille des kh 55 qui sont les mêmes à part que le KH55 peut emporter des têtes nucléaires) dont dix missiles logés sous les ailes d'une portée de 2.000 à 3.000 km avec un précision de moins de 20 mètres. Cela signifie que ces bombardiers peuvent détruire n'importe quelle cible en Syrie tout en étant hors de l'espace aérien syrien.
Le bombardier lourd Tupolev TU 160 (code Otan "blackjack"). C'est le plus gros avion supersonnique du monde, le plus rapide (2200 km/heure) et le plus lourdement armé du monde. Sa production commença en 1984, cessa dans les années 1990 puis fût reprise à partir de 2000. Son rayon d'action est de 12.300 km et son armement consiste en 12 missiles d'un emport total de 40.000 kg de bombes ou 12 missiles (soit des KH55, soit des KH 101).
Bombardier intermédiaire.
Le tupolev TU22M3 (code Otan "Backfire"), est un bombardier supersonnique à rayon d'action intermédiaire (6800 km), avec une capacité d'emport de 12.000 kg de bombes ou 12 missiles (KH55 ou KH101). Cet appareil entra en service en 1983.
Chasseur-bombardier.
Sukhoi 34 (code Otan "Fullback"), bombardier tactique, déstiné également à la lutte anti-navire. Entré en service en 2013. Ce bombardier est déstiné à l'attaque au sol de précision sur des cibles beaucoup plus petites que celles visées par les bombardiers lourds ou moyens évoqués plus haut.
Avions de chasse.
Sukhoi 27 M, connu sous l'appellation Sukhoi SU35 (code Otan "flanker E"). Avion de chasse multirole de 4eme génération, déstiné autant au combat air-air qu'à l'attaque au sol. Dans le cas présent il sera déstiné à escorter les bombardiers décrits plus haut.
Voilà les nouveaux arrivants sur le théatre des opérations syrien, tous basés en Russie.
Quelle sont les implications de ce nouveau déploiement de force ?
Il y a en a plusieurs mais pour les comprendre il faut tout d'abord se poser la question de savoir à quoi vont bien pouvoir servir ces bombardiers lourds à long rayon d'action.
Ces appareils vont servir à attaquer les infrastructures de Daesh sur tout le territoire syrien, y compris les bunkers les plus profondément enterrés. Il faut savoir que nous avons affaire à des bombardiers capables d'emporter les bombes conventionnelles guidées les plus puissantes du monde :
- la FAB 9.000, qui emporte 9.000 kg d'explosifs
- ou la nouvelle (2007) AVBP, surnommé le "père de toutes les bombes", qui est la bombe conventionnelle la plus puisssante jamais réalisée, emportant l'équivalent de 44 tonnes de TNT et pouvant annihiler tout batiment ou quoi que ce soit d'autre sur un rayon de 300 mètres. C'est une bombe à effet de souffle dite thermobarique avec un nouel explosif réalisé grâce à la nanothechnologie.
Même s'il n'est pas dit que les russses se serviront de ces monstres, il n'en reste pas moins, et c'est essentiel, qu'avec seulement quelques bombardiers de ce type, les capacités de frappe de la force aérienne russe opérant en Syrie viennent de passer de 200 tonnes d'emport (toute la flotte aérienne russe basée en Syrie) à 800 tonnes (nouveaux bombardiers basés en Russie : 600 tonnes).
Ayant cela en tête, le ministère de la défense russe a annoncé que les avions russes basés en Syrie serviraient désormais exclusivement à soutenir les forces alliées au sol contre Daesh et les petits copains de notre ministre des affaires étrangères qui "font du bon boulot" (Al Qaeda/Al Nusra et compagnie). Ce qui implique que les terroristes vont devoir affronter toute la flotte aérienne russe basée en Syrie en permanence, en soutien de l'armée syrienne, puisqu'elle sera libérée de la tâche de détruire les infrastructures de Daesh et de désorganiser, voire d'interrompre complètement, ses approvisionnements en munitions et en matériel, tout comme ses traffics de pétrole et autre sources de rentrées financières.
Etant donné que depuis quelques semaines les terroristes donnaient déjà de sérieux signes de fatigue face à l'armée syrienne et aux attaques aériennes russes, pourtant relativement restreintes dues à sa double mission, nous pouvons raisonnablement penser qu'aujourd'hui le front pourrrait très bien s'écrouler d'un coup face au décuplement des attaques aériennes contre eux. Les cas de désertion s'étant déjà très nettement accrus chez Daesh et compagnie ces derniers temps, gageons que ces phénomènes vont s'amplifier dans les semaines à venir et que la démoralisation des terroristes face aux coup de butoir des Syriens et des Russes va s'amplifier jusqu'à devenir endémique et incontrolable.
Il est également probable que ce redéploiement des forces aériennes russes sonnent le début de l'attaque générale pour libérer la partie d'Alep qui reste aux mains des terroristes. De plus il est très probable que l'emploi de tous les avions et hélicoptères russes disponibles en soutien de l'armée syrienne, non seulement permettra de sceller les derniers points de passage via la frontière turque mais également empêchera, ou en tout cas limitera sérieusement, les receptions de renforts, de munitions et de matériel lorsque leurs voies de communication avec la Turquie seront hermétiquement scéllées et celles avec Racca systématiquement attaquées et détruites, ce que permet aisément la reprise récente de la base de Kweiress par l'armée syrienne.
Face à tous les oiseaux de mauvais augures qui coâssent depuis un mois et demi en prédisant un "Vietnam" ou un "Afghanistan" pour les russes, nous pensons qu'ils se trompent et qu'il se pourrait bien que, au contrairen, nous ayons quelques très bonnes surprises plus rapidement que quiconque le prévoyait. L'arrivée de cette nouvelle flotte aérienne russe pourrait bien en être la clé.
Mais n'anticipons pas et restons raisonnablement optimistes.