Le 9 Novembre l’AIEA doit rendre son rapport sur l’Iran et son soit-disant programme nucléaire.
En réalité Yukiya Amano, le directeur de l’AIEA le rendra aujourd’hui.
Mais pas à Vienne aux membres de l’AIEA.
A Washington dont on disait depuis longtemps qu’il était le client ; c’est-à-dire depuis le départ de son prédécesseur Baradei et les révélations de wikileaks à ce sujet. Et c’est bien évidemment pour cette raison qu’il fût nommé au poste qu’il occupe actuellement. Il est donc aux ordres de Washington à qui il fait un rapport en avant première afin de déterminer ce qu’il lui faudra dire où non en fonction des desiderata de l’administration Obama, elle-même sous intense pression de la part du lobby israélien (l’AIPAC), des néo-conservateurs et des pays du Golfe, Arabie Saoudite en tête.
Effectivement depuis quelques semaines nous pouvons entendre le son des tambours rouler d’un côté à l’autre de l’Atlantique, et même jusqu’au fond de la Méditerranée.
Et pour cause.
La propagande fût savamment mise au point, une campagne de désinformation de plus en plus présente et insistante jusqu’à la menace suprême : la guerre. Bien entendu tout cela a pour but de conditionner les esprits (c’est facile ils sont si faibles et si prêts à croire...) afin que le rapport de l’AIEA, et ce quel que soit la qualité de son contenu, puisse être travesti de la manière voulue par les lobbyes.
Nous avons donc eu droit à tout :
- les essais de missiles balistiques israéliens à longue portée (lisez : capables d’atteindre l’Iran),
- les manoeuvres aériennes conjointes de l’aviation israélienne sur une base de l'Otan en Sardaigne (lisez : opération de longue distance pour bombarder des installations nucléaires, iraniennes par exemple).
- Puis nous avons eu la fiction de l’attentat contre l’Ambassadeur d’Arabie Saoudite à Washington, dont on n’entend plus parler en raison du scepticisme général (à part Cameron bien sûr et quelques autres caniches appointés) qui accueillit cette affaire ridicule.
- Ensuite de quoi il y eut les « fuites » organisées qui se répandirent dans la presse israélienne selon lesquelles le gouvernement se serait mis d’accord pour attaquer des sites nucléaires iraniens, « préventivement » bien entendu et par « souci humanitaire » comme il se doit. A cette occasion nous fûmes informés qu’il n’y avait plus d’opposition au sein du cabinet pour une attaque préventive contre l’Iran.
- Puis il y eut la fausse grosse colère de Bibi à propos des dîtes « fuites » et sa demande qu’une enquête soit entreprise à ce propos.
- Enfin on nous fait maintenant savoir, de Washington cette fois et sous le sceau de l’anonymat le plus strict bien sûr, que l’administration US craint qu’Israël n’attaque l’Iran sans demander la permission à Washington.
En effet avec tout l’argent que les USA donnent à Israël depuis des décennies, tout le mal qu’ils se donnent pour lui faire plaisir en toute circonstance, le tout aux dépends de leurs propres intérêts, ce ne serait vraiment pas gentil de la part des Israéliens ; et puis c’est bien connu que les USA sont tout à fait démunis pour forcer les Israéliens à faire ce qu’ils veulent qu’ils fassent où
non.
Désormais, chers lecteurs, le suspense est à son comble, nos coeurs battent la chamade à force d’angoisse ; l’univers tout entier attend le rapport de l’AIEA qui, nous le savons tous, nous révélera, ô horreur insoutenable, que l’Iran est sur le point d’avoir la bombe !
Qui l’eût cru ?
Personne.
Même pas la CIA dont le rapport sur les activités nucléaires iraniennes déclare formellement que les iraniens ont cessé toutes activités de recherches nucléaires militaires en 2003 ( à ce propos lisez l’article de Seymour Hersh dans le New-Yorker du 6 Juin 2011
ici).
Mais peu importe aux extrémistes au pouvoir à Tel-Aviv que le rapport soit favorable où pas. L’essentiel est de préparer les esprits comme cela fût fait pour l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, peut-être la Syrie demain et l’Iran après-demain. Car le but de Bibi et compagnie, comme des saoudiens et autre compagnie du Golfe, le but donc est de faire faire le sale travail aux USA à leur place. Pour une raison toute simple : ils ne peuvent pas le faire eux-mêmes, ni les Israéliens ni les états du golfe. Où alors de manière bâclée ce qui serait pire que tout.
Le moment est bien choisi : on entre dans une année de campagne électorale, année de toutes les faiblesses des politiciens made in US, particulièrement les présidents qui veulent se faire réélire. C’est en cela que le lobby israélien AIPAC est remarquablement efficace puisqu’il ne manque jamais de rappeler aux candidats combien il peut leur donner où pas pour leur campagne, en fonction de leur politique étrangère accommodante pour Israël où non.
Cette année la campagne électorale s’annonce une des plus chère de l’histoire des USA, celle d’Obama plus que n’importe quelle autre parait-il. Les contributions de l’AIPAC seront donc les bienvenues, et ce d’autant plus que les premiers sacro-saints sondages montrent Romney gagnants contre le futur ex sauveur de l’humanité...
La première étape est donc de préparer les esprits pour renforcer les sanctions contre l’Iran à l’occasion de la remise du rapport de l’AIEA. Un espoir reste que ces sanctions fasse tomber le régime iranien, ce qui est peu probable étant donné les brillants résultats que ce genre de tactiques ont donné par le passé : Cuba, Irak etc... Plus sûrement les sanctions sont le prélude à la guerre comme l’a rappelé Ron Paul à la Chambre des Représentants alors qu’il contestait la nouvelle loi (HR1905) scélérate contre l’Iran sur le point d’être passée (Nous vous recommandons, chers lecteurs la lecture de cet article pour vous rendre compte de la folie de ce qui se passe au Congrès US :
ici ).
Sanctions do not work. They are precursors to war and usually lead to war. They undermine our economy and our national security. They result in terrible, unnecessary suffering among the civilian population in the target countries and rarely even inconvenience their leaders. We must change our foreign policy from one of interventionism and confrontation to cooperation and diplomacy. This race to war against Iran is foolhardy and dangerous. As with the war on Iraq, the arguments for further aggression and war on Iran are based on manipulations and untruths. We need to learn our lesson and reject this legislation and the push for war (ici).
(Sources : Rep Ron Paul - Statement on Mark-up of HR 1905, the Iran Threat Reduction Act of 2011 - House Foreign Affairs Committee - 2 Nov 2011)Le rapport de l’AIEA ne montre absolument rien de convainquant sauf pour ceux qui veulent prendre des vessies pour des lanternes, ainsi que le dit Jason Ditz :
But the reality is, the “evidence” leaked so far appears fairly minimal even as it is being touted as particualrly damning. Reports will allege that Iran has conducted some computer simulations of nuclear explosions.The physical evidence, to the extent it can be called that, are a “large steel container” at a military base outside of Tehran which is believed to have been used for high explosive testing.Which might conceivably have something to do with a nuclear weapon, but since the container is on the base used for research into explosives and missiles, might also be totally unrelated to anything but conventional weaponry.(Sources : Jason Ditz - 6 Nov 2011)On se souvient des fameux camions irakiens dont Powell montra les photos comme preuve que Saddam avait la bombe un peu à la manière des missiles à Cuba en 1962. Sauf que les fameux camions n’avaient strictement rien à voir avec quoi que ce soit touchant à un quelconque programme nucléaire. Aujourd’hui on recommence avec un container se trouvant sur une base dont la présence alimente les spéculations les plus folles.
Rien ne change, chers lecteurs, tout recommence sans arrêt car si l’histoire ne se répète pas elle bégaie souvent...
Aux USA les relais d’Israël sont sur le pont pour effrayer la populace de Washington par la menace d’une attaque unilatérale d’Israël sur l’Iran. Le message subliminal destinés aux USA serait donc : si vous ne faites rien nous le ferons et cela vous forcera à intervenir car nous n’avons pas les moyens de faire le travail correctement.
C’est ce que déclara Meir Dagan, l’ex fameux chef du Mossad en Mai dernier :
Dagan emphasized that attacking Iran would be different than Israel's successful air strike on Iraq's nuclear reactor in 1981. Iran has scattered its nuclear facilities in different places around the country, he said, which would make it difficult for Israel to launch an effective attack.The IAF's abilities are not in doubt, Dagan emphasized, but the doubts relate to the possibilities of completing the mission and reaching all targets.(Sources : Haaretz - Meir Dagan - 7 Mai 2011)A la question de savoir ce que cela provoquerait Meir Dagan répondit:
When asked about what would happen in the aftermath of an Israeli attack Dagan said that: "It will be followed by a war with Iran. It is the kind of thing where we know how it starts, but not how it will end."
The Iranians have the capability to fire rockets at Israel for a period of months, and Hizbollah could fire tens of thousands of grad rockets and hundreds of long-range missiles, he said.At the same time, Tehran can activate Hamas, and there is also a danger that Syria will join the war, Dagan added.(Sources : Haaretz - Meir Dagan - 7 Mai 2011)Mais si les Israéliens bombardaient une où plusieurs bases iraniennes tout le Moyen-Orient s’embraserait et le détroit d’Ormuz serait fermé en quelques heures ce qui provoquerait une hausse du prix du pétrole vertigineuse engendrant l’effondrement de toute l’économie mondiale déjà bien mal en point.
De plus si les pays du GCC s’imaginent qu’une guerre leur permettrait de régler à leur avantage le problème de leurs populations shiites, ils font une très lourde erreur qui pourraient leur coûter le pouvoir. Et nous ne parlerons pas des conséquences en Irak où l’influence iranienne est déjà très forte.
Contrairement à ce que les régimes sunnis pourraient croire il n’est pas du tout assuré non plus qu’une guerre provoquerait une union de tous les sunnis contre les shiites. En tout cas nous ne prendrions pas les paris sur ce point en Egypte par exemple. La réaction pourrait bien être une solidarité renforcée des populations musulmanes avec les iraniens attaqués par les Israéliens et/où les USA...
De toute manière cela provoquerait un chaos indescriptible aux conséquences catastrophiques pour tout le monde. Un autre ancien chef du Mossad, Hephraim Halevy, n’a pas hésité à proclamer haut et fort que l’Iran ne posait pas de menace existentielle à Israël mais qu’en revanche la menace existentielle pour Israël provenait de l’intérieur du pays lui-même :
“The State of Israel cannot be destroyed,” he told Ynet on Friday. “An attack on Iran could affect not only Israel, but the entire region for 100 years.”The former head of the Israeli secret service said Thursday during an army boarding school reunion that while Iran should be prevented from becoming a nuclear power, its capabilities are still "far from posing an existential threat to Israel.""The growing haredi radicalization poses a bigger risk than Ahmadinejad," Halevy said, adding that "the ultra-Orthodox extremism has darkened our lives."(Sources : Ephraim Halévy ex chef du Mossad 1998-2002) Halevy met en cause le danger que posent les ultra orthodoxe extrémistes qui gouvernent Israël et qui ont pris une importance politique démesurée dans ce pays depuis plusieurs années maintenant. Nous pourrions comparer ces gens-là avec les fondamentalistes chrétiens aux USA : même combat, même folie.
Alors guerre où pas guerre ?
Nous n'en savons rien dans la mesure où tout est possible lorsque l'on a affaire à des cervelles brulées. Mais il y a deux points néanmoins que l'on peut souligner et qui tempéreraient nos inquiétudes :
- Il y a une forte opposition à ces ardeurs guerrières à la fois au sein des services de sécurité israéliens et au sein de l'armée US
- Il est également fort possible que ces bruits de sabre et ces cris de guerre ne soient qu'une opération de guerre psychologique de plus pour parvenir à obtenir le vote de nouvelles sanctions à l'ONU à la suite de la publication du rapport de l'AIEA.
Cela dit s’il y a une menace réelle elle ne provient donc pas de l’Iran. Elle a pour origine une bande d'extrémistes à l'intérieur même d’Israël dont les cervelles mal irriguées sont influencées par une histoire vieille de 2000 ans : cette histoire est celle de Massada, et elle ne s’est pas bien terminée (
ici).
Mais pour le moment tout le monde est content à Cochon sur Terre, le meilleur des mondes.