vendredi 31 décembre 2010

L'affaire Khodorkovsky - 1ere partie -

Avertissements : Face à l'indigence des médias officiels "aux ordres" et appointés à propos de cette affaire, la Chronique de Cochon sur Terre a décidé de consacrer plusieurs articles au procès Khodorkovsky.
Voici le premier de la série.

1. L’oligarchie US a versé dans une schizophrénie dont elle ne se remettra probablement jamais.


Avez-vous entendu, chers lecteurs, les cris d’orfraie, les gémissements, les pleurs, les grognements d’indignation (évidemment !), les cris de désespoir et nous en passons... Tout ce tintamarre issu très principalement, il faut bien l’avouer, de la part de la branche US des Représentants Exclusifs du Bien sur Terre (les REBT), dont la vice-présidente n’est personne d’autre que la lumineuse et immaculée Secrétaire d’Etat US. Et elle sait, elle, de quoi elle parle lorsqu’il s’agit de droit de l’hommisme, de respect de la souveraineté de pays étranger (ce qui signifie que l’oligarchie US admette qu’ils n’appartiennent pas aux USA ce qui est très douteux ; n’oublions pas que selon Noam Chomski les USA croient qu’ils «own the world») : inutile non plus de rappeler leur maîtrise inégalée du respect du droit international, du respect de l’habeas corpus sans parler du respect extraordinaire que les USA nous donne chaque jour pour la vie privée des citoyens etc etc...

Fort de cette expertise incomparable, à nulle autre pareille, une maîtrise si parfaite de tous ces droits si sacrés des nations et des citoyens que jamais personne avant les REBT ne les avaient respectés aussi bien que Mme Clinton et consort, c’est-à-dire l’oligarchie US. Fort donc de cette expérience inouïe qui lui donne l’autorité incontestable en cette matière qu’on lui connaît, Mme Clinton a décrété que la peine décidée à l’encontre de Kodhorkovsky et de son complice Lebedev annoncée à Moscou ces derniers jours posait de :

"serious questions about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations".
(Sources : The Guardian - 28.12.2010)

Bien sûr quelques perroquets européens au cervelas fracassé par le professeur Pavlov, telle que la Commissaire européenne aux Affaires étrangères Catherine Ashton (en toute indépendance bien sûr), ont ressortis quasiment dans les mêmes termes leur « angoisse » (...) à propos de la sentence que le tribunal de Moscou a rendu contre l’ex-magnat du pétrole russe et son complice.

On ne peut pas dire que nous autres Occidentaux, c’est-à-dire les Représentants Exclusifs du Bien sur Terre (REBT), ne soyons pas idéalement représentés par nos oligarchies bien-aimées dont les politiciens sont toujours si bien intentionnées et surtout si conformes en tous points à leurs discours lénifiants et bien-pensants. D’ailleurs quel meilleur exemple que celui qui nous est offert par l’Empire du Bien, les USA, depuis maintenant plusieurs décennies ; un exemple que l'oligarchie dirigeante de celui-ci s’efforce par tous les moyens de nous faire imiter en suivant elle-même à la lettre les innombrables beaux discours qu’ils nous lancent à la figure toute la journée.
Prenons donc Mme Clinton au mot :

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui garde 174 prisonniers détenus dans le camp de Guatanamo à Cuba, désormais synonyme de violations les plus flagrantes des droits démocratiques les plus basiques tels que : refus des règles de l’habeas corpus (voir note 1 en fin d’article), refus du droit des détenus d’avoir un avocat, détention illégale et illimitée, détention sans chef d’inculpation, refus de la tenue d’un procès sans parler de la pratique intensive de toute sorte de torture sur les prisonniers dont la plupart sont enfermés depuis presque 10 ans maintenant.

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui a envahi, illégalement au regard du droit international, un autre pays, l’Irak, sans aucune justification sérieuse, c’est un pléonasme ! Un pays occupé désormais réduit à un champs de ruine dans lequel les morts civils provoqués par son occupation illégale par les troupes du gouvernement US se chiffrent selon les sources entre 108.430 et 250.000 personnes au 31 Décembre 2010.
(Sources : www.iraqbodycount.org et Information Clearing House)

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays dont les troupes où les services secrets, d’après les aveux de son ex-président Georges Busch (voir note 2 en fin d’article), pratiquent couramment la torture sur les prisonniers détenus dans des lieux secrets situés hors des USA pour ne pas se trouver en contradiction avec les lois censées s’appliquer sur son propre territoire. C’est ainsi qu’outre le fameux waterboarding

On recense, parmi les autres techniques employées : la nudité prolongée, les menaces, l'exposition au froid, le maintien dans des positions douloureuses, les agressions physiques, l'utilisation prolongée d'entraves et la privation de sommeil.
(Amnesty International - 10 Novembre 2010)

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui maintient à l’isolement le plus absolu depuis plus de neuf mois le soldat Manning, citoyen des USA, sans chef d’inculpation ; là encore en lui déniant ses droits à l’habeas corpus, ses droits à être représenté et à voir un avocat, sans envisager de jugement et sans parler de ce qui est considéré comme de la torture par les lois internationales, c’est à dire la privation de sommeil, l’isolation complète, le refus de couverture où d’un oreiller etc...

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui attaque et tue sans discrimination des populations civiles étrangères de nations avec lesquels aucune guerre n’est déclarée, comme le Pakistan, le Yemen etc...

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays dont le président s’apprête à passer un «executive order» qui donnera légalement le droit de détenir quelqu’un pour une durée illimitée sans passer en procès civil où devant une commission militaire. Ce seront les conditions de Guatanamo rendues légales sur le sol des USA. Certains défenseurs américains des libertés civiles s’en inquiètent :

Jameel Jaffer, a national security lawyer at the American Civil Liberties Union, said that the executive order would “normalize and institutionalize indefinite detention and other policies,” (souligné par nous) set in place by the Bush administration. Laura W. Murphy, director of the American Civil Liberties Union’s Washington legislative office, added, “Our Constitution requires that we charge and prosecute people who are accused of crimes. You cannot sell an indefinite detention scheme by attaching a few due-process baubles and expect that to restore the rule of law.”

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays dont le président vient de signer une autorisation de rechercher et d’assassiner le citoyen américain Anwar Al-Awlaki par ses services de sécurité.

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays dont de nombreux membres du Congrès comme de l’Administration ont demandé publiquement l'exécution pure et simple d’un journaliste pour avoir publié des documents qu’on lui avait remis, journaliste théoriquement protégé par le 1er Amendement de la Constitution américaine en vertu de la liberté de la presse (voir à ce sujet notre article du 10 Décembre 2010)

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays dont le président a bloqué toute initiative destinée à juger les membres du gouvernement et de la précédente administration coupables de crimes de guerre aux yeux des lois internationales. Il est vrai que ce faisant cela pourrait ouvrir la voie à sa propre inculpation et celle de son administration puisqu’ils pratiquent la même politique que leurs prédécesseurs.

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui demande à ses diplomates d’espionner les diplomates étrangers et de leur voler leurs données personnelles telles que leur ADN, leurs empreintes digitales, leurs numéros de cartes bancaires où de programmes de « frequent flyers » etc... sans parler de l’espionnage intensif des membres des missions diplomatiques accrédités à l’ONU, du Secrétaire Général et des membres du Conseil de Sécurité, y compris les soit disant « alliés » des USA.
Il est vrai que Mme Clinton ne peut pas avoir beaucoup d’inquiétudes à ce sujet puisque c’est elle qui a donné les ordres (voir à ce sujet notre article du 10 Décembre 2010).

C’est bien évidemment en gardant intact une foi profonde et une absence totale d’inquiétude "about selective prosecution and about the rule of law being overshadowed by political considerations" (Sources : The Guardian 28.12.2010) que Mme Clinton accepte d’être la Secrétaire d’Etat d’un pays qui a condamné à 150 ans de prison Bernard Madoff pour escroquerie, sans qu’on ait jamais su les tenants et aboutissants de cette affaire, ni où ont atterri les fonds volés. A noter que Khodorkovsky non seulement a eu droit à un procès public avec des avocats qui peuvent faire appel, mais en plus il n’a été condamné qu’à 14 ans de prison (pas 150!) pour des faits autrement plus graves dont nous reparlerons dans le prochain post.

Nous n’allons pas continuer car la liste des actions de l’Empire du Bien méprisant tout droit international comme sa propre constitution ainsi que les principes basiques de l’habeas corpus (voir note 1) est interminable. Si nos lecteurs veulent un peu plus de renseignements sur la conduite irréprochable du gouvernement des USA en matière de droit de l’hommisme, de respect des individus et des règles du droit internationales nous vous renvoyons à la note 3 à la fin de cet article. Une consultation du site d’Amnesty International n’est pas sans valeur non plus (www.amnesty.org).

Ces quelques exemples nous prouvent bien à quel point les discours des dirigeants US sont complètement décorrélés de leurs actions où de celles qu’ils couvrent, voire qu’ils ordonnent. Il est certain que toute responsabilité politique peut impliquer des décisions qui ne sont pas en accord avec ce que l’on prône ouvertement. Mais il ne s’agit plus ici de situations extra-ordinaires, c’est à dire qui ne représentent pas la norme mais l’exception. Aujourd’hui c’est l’inverse; l’extra-ordinaire est devenu l’ordinaire de chaque jour mais on continue à vivre et à parler comme si rien n’avait changé. Et nulle part ailleurs cette situation n’est plus flagrante qu’aux USA.
Pour quiconque relève les discours annonés par les membres de l’oligarchie US, les professions de foi déclamées le coeur en bandoulière, la larmes à l’oeil et la main sur la Constitution qui garantit les droits de l’habeas corpus, le droit de libre parole où les droits de la presse, la liberté individuelle etc, ceux la mêmes qui les louent en discours au Congrès mais les bafouent dans la foulée en signant des lois pour les uns, des ordres pour les autres, en les exécutant pour tous, le tout sans aucune vergogne ni hésitation. Peut-être même sans aucune conscience de ce qu’ils font, sans faire aucun lien entre ce qu’ils répètent toute la journée et leurs actes.
Le « peut-être » est de trop d’ailleurs.
C'est ce que l'on nomme de la schizophrénie. En voici la définition :

« Schizophrénie » provient de « schizo » du grec « σχίζειν » (schizein) signifiant fractionnement et « φρήν » (phrèn) désignant l’esprit. C'est donc une « coupure de l'esprit », pas au sens d'une "double personnalité" comme on l'entend parfois, mais au sens d'une perte de contact avec la réalité (souligné par nous) ou, d'un point de vue psychanalytique, d'un conflit entre le Moi et la réalité.

Cette perte de contact des dirigeants US avec la réalité est le reflet de leur refus de s’adapter à une situation géostratégique nouvelle qui est en train de remettre en cause la position de leur pays dans le monde (et donc l’image qu’ils ont de celui-ci et d’eux-mêmes par rapport à ce même monde) ; ce refus obstiné de la réalité couplé à la vision grandiose qu'ils ont de leur puissance les a entrainé à concevoir des objectifs démesurés par rapport aux moyens qu'ils avaient de les réaliser; les échecs qui s'en sont suivis immanquablement furent imputés à des ennemis extérieurs, tous diabolisés les uns après les autres, situation qui a engendré une paranoïa exponentielle qui entraîne des décisions toujours plus couteuses qui mènent toujours plus vite le pays à l'abime.
Nous verrons comment l'affaire Khodorkovsky a sa place dans tout cela.

Notes


1 - Habeas corpus: règle de droit qui garantit à une personne arrêtée une présentation rapide devant un juge afin qu'il statue sur la validité de son arrestation. Généralement, le délai est de quelques jours ou de quelques heures. En latin, cela signifie que tu aies ton corps (... pour être devant le juge). La règle de l'Habeas corpus a pour fondement que, même détenue, une personne n'est pas sans droit. En fonction de cette règle, un prisonnier doit être relaché s'il est détenu sans raison valable aux yeux de l'autorité judiciaire, laquelle doit être placée dans une relative indépendance par rapport aux pouvoirs législatif et exécutif. Texte français de l'Habeas Corpus
Ce principe est à la base de l'État de droit. Ce principe limite les prérogatives du pouvoir exécutif, des forces policières et pénitenciaires en particulier.
Le principe de l'Habeas corpus est généralement respecté dans les sociétés démocratiques. Lors d'une situation d'urgence, de crise, d'insurrection, de guerre ou tous les cas de régimes autocratiques (militaires, totalitaires, etc) la règle de l'Habeas corpus est cependant souvent bafouée ou limitée dans son application.

2 - Dans ses mémoires, publiés le 9 novembre, et dans un entretien diffusé sur NBC News le 8 novembre 2010, l'ancien président a confirmé son implication personnelle dans l'autorisation du waterboarding (simulacre de noyade) et d'autres techniques contre des « détenus de grande valeur ».
« Aux termes du droit international, le fait que l'ancien président admette avoir autorisé des actes s'apparentant à la torture suffisent pour que les États-Unis soient dans l'obligation d'enquêter sur ses propos et, s'ils sont corroborés, de le poursuivre », a déclaré Claudio Cordone, directeur général d'Amnesty International.
« Ses aveux mettent une fois de plus en évidence l'absence d'obligation de rendre des comptes pour la torture et les disparitions forcées, crimes de droit international dont les États-Unis se sont rendus coupables. »
(Sources : Amnesty International - 10 Novembre 2010)

3 - Voir cet article sur le site d’Amnesty International :
http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/daily-injustice-immeasurable-damage-2010-03-05

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